Retour
index
La
situation de l'asile en France est critique !
10 conditions minimales pour un réel droit d'asile en France
octobre
2001
Version
pdf [95 kb]
En
2001, des constats sévères ont été dressés
en janvier par la Cour des comptes, en mars par le Haut Commissariat
pour les Réfugiés (HCR), en juillet par la Commission
nationale consultative des droits de l'homme… Les associations
de la Coordination Française pour le Droit d'Asile (CFDA)
s'épuisent à combler les lacunes d'une administration
défaillante ou dépassée : elles ont interpellé
les pouvoirs publics à plusieurs reprises et veulent aujourd'hui
alerter les parlementaires et plus largement l'opinion publique.
La
Convention de Genève relative au statut des réfugiés
a permis de protéger 50 millions de personnes dans le monde
depuis 1951. À l'occasion de son 50ème anniversaire,
à l'Assemblée Nationale, 577 réfugiés
ont proclamé par l'Appel de Paris que cette Convention “demeure
l'instrument fondamental de la protection internationale des réfugiés”.
Aujourd'hui,
ce texte est largement remis en cause. Au sein de l'Union européenne,
15 des Etats les plus riches du monde travaillent à rapprocher
leurs politiques en application du traité d'Amsterdam. Tout
en réaffirmant leur attachement à cette Convention,
ils mettent en place des mesures qui affaiblissent le système
international de protection. En octobre 1999 à Tampere en
Finlande, les chefs d'Etat et de gouvernement des pays de l'Union
ont pris un engagement solennel sur le “respect absolu du
droit de demander l'asile” ; les premiers textes adoptés
ensuite visaient pourtant à renforcer le contrôle des
flux migratoires avec pour conséquence d'entraver pour certains
réfugiés l'accès aux procédures d'asile
(sanctions aux transporteurs, réseau d'officiers de liaison).
De même, les notions de protection “temporaire”
en cas d'afflux massifs ou “subsidiaire” tendent à
normaliser un statut au rabais.
Une
nécessaire amélioration de l'asile en France ne peut
se faire en marge des travaux menés au sein de l'Union européenne.
Un chantier important est lancé sur les procédures
d'asile, sur les conditions d'accueil des demandeurs, mais aussi
sur une interprétation commune de la définition du
réfugié. Les travaux des Quinze doivent se dérouler
dans la transparence ; ils ne doivent pas déboucher sur l'abaissement
des garanties prévues par les propositions de la Commission
européenne. Les questions d'asile et d'immigration étant
très entremêlées, il est aussi nécessaire
de redéfinir clairement une politique d'immigration, lisible
et ouverte.
Les
associations de la Coordination Française pour le Droit d'Asile
réaffirment leur attachement au droit d'asile comme droit
fondamental et à la Convention de Genève comme socle
du droit pour le statut des réfugiés.
Les
associations de la Coordination Française pour le Droit d'Asile
(CFDA) soussignées font 10 recommandations en matière
de traitement des demandeurs d'asile, avec une demande d'attention
particulière pour les personnes vulnérables (mineurs,
femmes, personnes âgées, handicapées…)
en France tant métropolitaine qu'outre-mer et quel que soit
le type d'asile demandé :
1-
La protection doit être la priorité de toute politique
d'asile. Aucune mesure ne doit être un obstacle pour l'asile
: l'admission sur le territoire doit être la règle
pour les demandeurs d'asile et un recours suspensif institué
en cas de refus. Les demandeurs d'asile ne doivent pas être
pénalisés, en l'absence de documents de voyage, du
fait des sanctions aux transporteurs, des accords de réadmission…
Le système du maintien en zone d'attente doit être
respectueux des personnes et de leurs droits.
2-
La France doit adopter une interprétation pleine et entière
de la définition du réfugié de la Convention
de Genève, notamment en ce qui concerne la notion d'agent
de persécution.
3-
Le système de la Convention de Dublin de responsabilisation
d'un Etat membre pour l'examen des demandes d'asile doit être
modifié : dans le texte actuellement en discussion au sein
de l'Union européenne, le principe doit être que la
demande est examinée dans le pays où elle est déposée.
4-
Les dysfonctionnements constatés à tous les stades
des procédures d'asile en France exigent de revoir celles-ci
en profondeur. A chaque étape (demande en frontière
ou sur le territoire, première instance et recours) le demandeur
doit être entendu, disposer d'un conseil et d'un interprète
; le refus doit être explicitement motivé et le recours
suspensif. La durée totale de l'instruction des demandes
ne doit qu'exceptionnellement dépasser 6 mois. Cela suppose
la mise en place de moyens conséquents aux divers niveaux
de procédure pour éviter les dérives actuelles,
notamment la pratique de délais en préfecture (convocations)
: la décision d'accorder l'autorisation de séjour
doit être prise lors de la première démarche
de demande d'asile.
5-
Le système d'hébergement pour les demandeurs du statut
de réfugié présente une originalité
à maintenir : la liberté de choisir sa solution, soit
individuelle, soit collective en Centre d'Accueil pour Demandeurs
d'Asile (CADA). Pour que ce choix soit réel pour tous les
demandeurs d'asile, l'offre en places collectives doit être
suffisante et le soutien apporté équivalent dans chacune
de ces formules : accompagnement socio-juridique spécifique,
accès aux soins et plus généralement toutes
formes d'aides à la vie courante. Pour manifester une solidarité
nationale dans l'accueil, des places collectives en CADA doivent
être prévues plus largement sur le territoire avec
une instance de régulation nationale coordonnant des commissions
locales d'admission. Les candidats à l'hébergement
collectif doivent être accueillis dans un centre dans les
jours qui suivent le dépôt de leur demande, en tenant
compte de la vie familiale et de l'intérêt de chacun.
6-
Les aides financières pendant les procédures doivent
être d'un niveau respectant la dignité de chaque personne.
Elles peuvent être versées en plusieurs temps :
• Allocation ponctuelle au nouvel arrivant (actuelle “allocation
d'attente”) pour la période de mise en route de l'allocation
plus pérenne (ci-dessous).
• Allocation pour vivre dignement (au moins équivalente
au RMI) pendant toute la procédure avec prise en compte de
la composition familiale (modulable selon les solutions d'hébergement).
• Allocation pour les besoins liés aux procédures
: traductions, bons de transports pour honorer les convocations,
frais d'avocat…
7-
La communication et l'autonomie des personnes doivent être
favorisées dès le début de la procédure
: interprétariat, apprentissage de la langue, mise en relation
avec l'environnement. L'accès à la formation professionnelle
doit être immédiat, le droit au travail doit être
rétabli.
8-
L'accompagnement social et juridique doit être rendu possible
pour tous les demandeurs, tant pour la procédure que pour
la vie courante : une information de qualité est indispensable
dans une langue comprise par l'intéressé et l'aide
juridictionnelle doit être accordée indépendamment
de la régularité de l'entrée en France. Cet
accompagnement doit être organisé et accessible dans
chaque département.
9-
Certains demandeurs déboutés de l'asile se retrouvent
dans une situation inextricable : ils craignent pour leur vie en
cas de retour au pays et l'administration française ne veut
ou ne peut les éloigner du territoire. Elle se doit pourtant
de les protéger par des conditions d'existence légales.
Le régime de l'asile territorial, dépourvu de garanties
procédurales et de prestations sociales, trop rarement accordé,
ne peut servir de palliatif à une telle situation. Il convient
de trouver une meilleure solution.
10-
Une approche interministérielle est nécessaire pour
coordonner la question des réfugiés : divers ministères
sont chargés chacun de la partie qui le concerne, mais en
cas de dysfonctionnement d'un dispositif, c'est l'ensemble du système
qui se paralyse et induit des effets pervers Cette coordination
doit veiller à la cohésion des dispositifs dans la
transparence et agir dès les premiers signes émanant
notamment des associations concernées et nécessitant
l'intervention des instances publiques.
Les
associations de la Coordination Française pour le Droit d'Asile
réaffirment leur attachement au droit d'asile comme droit
fondamental et à la Convention de Genève comme socle
du droit pour le statut des réfugiés.
Les
organisations suivantes, membres de la Coordination Française
pour le droit d'asile, sont signataires de cette plateforme : ACAT,
Amnesty International, APSR, CASP, CIMADE, COMEDE, Forum Réfugiés,
GAS, GISTI, LDH, MRAP, Primo Lévi, Secours Catholique, SNPM,
SSAE.
|